La conjoncture fracture le bloc des Émergents

08 juin 2022

Sanctions, ralentissement du commerce, pénuries… la guerre en Ukraine coûte cher à l’économie mondiale ! Les organisations économiques internationales commencent d’ailleurs à se faire une idée assez précise de son impact. Selon l’OCDE, cette guerre va amputer de -1,1 point la croissance du PIB réel mondial pour l’année en cours (qui devrait s’établir à +3,4 %). Globalement, le FMI a un avis assez similaire puisqu’il vient d’abaisser de -80bp (par rapport à janvier, c’est-à-dire juste avant l’invasion russe) sa propre projection pour 2022, désormais à +3,6 %. Le consensus FactSet coupe la poire en deux en tablant quant à lui sur une croissance globale de +3,5 %.

L’instabilité des prix de l’énergie et des matières premières (due au triptyque : Covid, guerre en Ukraine et dérèglement climatique) n’épargne pas les économies émergentes qui voient (dans des proportions diverses) leur inflation augmenter. Outre la Russie qui constitue un cas très particulier, le Brésil et l’Inde sont les Émergents les plus touchés par l’actuelle hausse généralisée de l’inflation. Au Brésil, les prix à la consommation augmentent ainsi de +12,1 % sur un an en avril (contre un objectif d’inflation de +3,75 % en 2022). En Inde, l’inflation qui augmente de +7,8 % sur la même période reste elle aussi trop éloignée de son objectif de +4 % (la tolérance étant limitée à +2 % pour les autorités monétaires indiennes).

À l’inverse, la Chine affiche toujours une inflation bien plus contenue : à +2,1 % sur un an en avril, elle demeure inférieure à sa cible (autour de 3 %). Pour des raisons déjà évoquées (cf. notre précédente lettre), le risque inflationniste épargne la Chine dans une large mesure. Avec sa stratégie « zéro Covid », l’arrêt forcé de l’économie ne sera pas resté sans conséquences : les principaux secteurs d’activité de l’économie chinoise connaissent (et risquent de continuer de connaître dans les mois à venir, par phénomène d’inertie) une importante contraction : l’indice PMI des directeurs d’achats est tombé à 46 en mai pour le secteur manufacturier (secteur qui a contribué à 39,4 % du PIB chinois en 2021) et, plus grave encore, jusqu’à qu’à 36,2 pour celui des services (contribution du tertiaire en 2021 : 53,3 % du PIB).

Dans ce contexte, il n’est pas étonnant de constater le retard conséquent pris par les marchés actions émergents (-8,4 %) vis-à-vis des marchés actions américains (-4,0 %) et encore plus européens, ces derniers affichant même une performance positive en monnaie locale depuis début mars dernier (+0,6 %). Même si la levée partielle des contraintes liées à la situation sanitaire peut redonner un peu de souffle aux actions asiatiques, la conjoncture internationale nous amène à réitérer notre préférence pour les actions des pays matures, particulièrement européennes.

Du côté de la microéconomie, avec 97 % des entreprises ayant dorénavant publié leurs résultats, il nous est désormais possible d’être plus affirmatif sur les chiffres affichés le mois dernier et ainsi de confirmer la bonne tendance initiale dessinée lors du début de la phase de publication du T1 2022. La dynamique de révisions positives reste de vigueur avec un nombre de surprises positives qui reste élevé (77 % aujourd’hui contre 80 % lors de notre précédente lettre). Et la progression des bénéfices du S&P 500 est toujours impressionnante avec à +9,2 %. C’est seulement l’ampleur des surprises qui diminue : les entreprises ont ainsi publié des bénéfices supérieurs de 4,7 % à ce qui était attendu par les analystes à la fin mars (les analystes tablaient sur une hausse des bénéfices agrégés du S&P 500 de +4,6 % à la fin du premier trimestre).

Malgré des prévisions bien moins exaltantes pour le T2 2022, les analystes se veulent toujours largement optimistes pour les prévisions de cette année. En effet ceux-ci anticipent pour l’année 2022 une croissance des bénéfices de +10,0 % !

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