La Chine tire trop rapidement les matières premières vers le haut

05 mars 2021

Mais où s’arrêtera la Chine ? Après avoir comme tout le monde souffert en début d’année en raison de la crise sanitaire, le rebond de l’empire du Milieu a été impressionnant, permis contre toute attente par l’envolée des exportations, à rebours du ralentissement du commerce mondial.
Comble de l’ironie, ce sont les exportations vers les Etats-Unis qui se sont le plus envolées… au moment même où Donald Trump faisait ses adieux à la Maison Blanche. Mais la bataille est loin d’être terminée et Joe Biden a déjà commencé à se pencher sur cette question. Ce dernier a d’ailleurs d’ores et déjà dénoncé les pratiques commerciales « coercitives et déloyales » de l’empire du Milieu lors d’un entretien avec Xi Jinping en milieu de mois dernier… provoquant l’ire de Pékin. En réponse, les chinois ont affirmé vouloir réduire les exportations des terres rares, métaux indispensables aux industries de la défense et de la tech, notamment à destination des Etats-Unis.

Les tensions géopolitiques qui pourraient découler de ce conflit ouvert entre les deux plus grandes puissances mondiales ne sont toutefois pas un sujet d’inquiétude pour les investisseurs. Pour le moment, seule la thématique du recovery mondial piloté par la Chine les intéresse, entrainant vers le haut toutes les matières premières, qu’elles soient énergétiques ou même agricoles. Attention toutefois, car l’inflation des prix des matières premières est telle qu’elle pourrait pénaliser assez rapidement les marges des entreprises mais surtout le pouvoir d’achat des ménages occidentaux, déjà bien fragiles, et ainsi étouffer dans l’oeuf le rebond qui devra gagner en vigueur une fois les stratégies de vaccination plus avancées. C’est d’ailleurs cette crainte d’un retour trop rapide de l’inflation qui commence à faire douter les investisseurs, avec la hausse des rendements obligataires, surtout américains, et le début d’une correction des indices boursiers en fin de mois dernier.

Dans le sillage de la Chine, la croissance mondiale devrait repartir en 2021, même si les prévisions de croissance des différentes grandes institutions internationales sont aujourd’hui divergentes. En observant l’avancée des stratégies vaccinales, nous faisons aujourd’hui plus confiance aux prévisions du FMI, plus favorables aux Etats-Unis (+5.1%) qu’à la zone euro (+4.2%). En effet, le rythme de vaccination reste presque 3x supérieur aux Etats-Unis. L’écart se creuse donc logiquement et il est fort probable que les objectifs de croissance ne soient pas atteints sur le Vieux Continent. Au final, entre des indices boursiers européens pénalisés par des perspectives de croissance plus faibles qu’ailleurs et des indices américains pénalisés par la remontée des taux (le 10 ans américain se rapproche inexorablement du rendement des dividendes du S&P500), ce sont les indices asiatiques et émergents qui s’en tirent le mieux depuis le début d’année (respectivement +8.0% et +8.9% pour le MSCI Japon et MSCI pays émergents).

Pour le moment, tout va pour le mieux sur le front de la microéconomie : la fin de la saison de publication des résultats du T4 2020 aux Etats-Unis s’approche à grands pas et sur les 85% de l’ensemble des valeurs du S&P 500, 80% d’entre-elles ont surpris positivement concernant leurs profits. A l’heure actuelle, les bénéfices agrégés du S&P500 sont attendus en hausse de +3.1% et les premières communications des entreprises pour le Q1 2021 sont d’ailleurs également bien orientées avec des positive guidances largement majoritaires. L’absence de déceptions dans ce domaine est un prérequis au maintien des cours sur leurs niveaux actuels, notamment aux Etats-Unis, notre modèle d’évaluation indiquant qu’une consolidation serait aujourd’hui nécessaire sur les marchés US : notre cours objectif se situe désormais à 3443 points contre un marché qui a continué sa hausse jusqu’à 3925 points (+3.6% depuis la précédente lettre), soit un potentiel de baisse de -12% par rapport au point haut (les indices ont déjà corrigé de -2.9%). D’un point de vue fondamental, notre modèle exprime surtout la nécessité pour le S&P 500 de reprendre sa respiration après une hausse quasiment continue de +68% depuis mi-mars 2020, dans un contexte où le pari des investisseurs sur la hausse des taux est probablement trop agressif à court terme. Dans ces conditions, il nous semble opportun de recommander la prudence vis-à-vis des actions américaines. La donne est sensiblement différente en zone euro, notre modèle d’évaluation estimant que les actions européennes sont à leur juste prix quel que soit le scénario envisagé. Dans ces conditions, nous surpondérons les actions européennes par rapport aux actions américaines à court terme.

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