La Chine face à de multiples vents contraires en 2022

05 février 2022

En hausse de +8,1 % sur l’ensemble de l’année 2021, la croissance du PIB réel de la Chine a de quoi faire pâlir d’envie la quasi-totalité des pays industrialisés. Mais ce chiffre masque une réalité moins rose : la fin d’année a été marquée par un fort ralentissement, la croissance du 4ème trimestre n’ayant atteint que +4 %, soit son niveau le plus faible depuis de très nombreuses décennies, hors période de Covid bien entendu. Faut-il s’en inquiéter ? Oui et non. À y regarder de plus près, cette fin d’année 2021 est plutôt conforme à la tendance de long terme de la croissance chinoise, en lente diminution depuis le début de la décennie passée et qui traduit l’inéluctable convergence de la croissance chinoise vers celles des autres grandes zones économiques. Pour autant, au-delà de cette problématique structurelle de baisse de la croissance potentielle, la Chine doit également faire face à de nombreux risques de court terme, plus conjoncturels mais qu’il convient de ne pas sous-estimer, à l’image de l’endettement du secteur privé (la crise des promoteurs immobiliers en est l’illustration parfaite), des tensions sociales qui parcourent désormais le pays ainsi mais aussi de la reprise en main brutale du pouvoir économique par le pouvoir politique.

La principale cause d’incertitude économique mondiale à l’heure actuelle réside dans la bulle d’endettement du secteur privé en Chine, qui, si elle explosait, serait susceptible de faire littéralement dérailler le pays et créer un effet domino à l’échelle mondiale. Il faut dire que les chiffres donnent le tournis : officiellement, l’endettement des entreprises chinoises s’élevait déjà à 139,1 % du PIB en 2020, mais le système de financement de l’économie demeurant opaque dans l’Empire du Milieu, il est probable que ce chiffre sous-estime la réalité …

Sur le plan monétaire, l’année 2022 sera marquée par le découplage des politiques occidentales et chinoise. La Chine n’ayant aucun impératif de lutte contre l’inflation, au contraire des États-Unis ou même de la zone euro (même si une inflation durablement forte ne constitue toujours pas notre scénario central à l’heure actuelle pour la première économie mondiale), elle va donc privilégier le soutien de son économie domestique par des baisses de taux d’intérêt… soit l’exact opposé des États-Unis !

Les défis structurels de la Chine nous poussent encore à préférer les actifs occidentaux en 2022. Si la sous-performance des indices asiatiques a été très marquée en 2021 (-35 % entre février et la fin décembre), elle devrait toutefois être moins intense en 2022, de nombreux facteurs négatifs ayant déjà été intégrés dans les cours. Mais le manque de visibilité nous incite à nouveau à préférer le couple rendement/risque des actifs occidentaux par rapport aux actifs chinois.

Même si la tendance de croissance bénéficiaire du T4 2021 est bien moindre qu’au cours des précédents trimestres, la saison de publication des résultats qui a commencé depuis la mi-janvier (un peu plus du tiers des sociétés du S&P 500 ont aujourd’hui publié) est très bien orientée. En effet, la progression des bénéfices du S&P 500 est attendue à +24,3 % pour le 4ème trimestre (contre +21,4 % en fin d’année dernière lors de notre précédente publication). De plus, 78 % des sociétés qui ont publié ont surpris positivement (soit un peu plus que la moyenne au cours des 5 dernières années, à savoir 76 %). On notera tout de même que pour le moment, le consensus n’a été battu que de 4,0 % en agrégé alors qu’au cours des 5 dernières années, les entreprises le battaient en moyenne de 8,6 % ! Le rythme des révisions traduit donc pour la première fois depuis de nombreux trimestres un optimisme moins marqué.

Notre modèle d’évaluation indique que les marchés actions américains semblent désormais légèrement sous-valorisés. Une hausse de l’ordre de 7/8 % est envisageable dans nos deux scénarios. Pour faire simple, les marchés actions américains pourraient réatteindre leurs précédents niveaux mais ne devraient pas reprendre une marche haussière durable (ils devraient osciller, faisant la part belle aux stratégies de stock-picking capables de générer de l’alpha). En zone euro, notre modèle d’évaluation nous indique que les actions européennes sont aujourd’hui sous-cotées en fonction de l’évolution des taux (en cas de slow recovery, les taux tendront inévitablement vers 0). Le potentiel d’appréciation est légèrement plus élevé qu’aux Etats-Unis et est de l’ordre de +12 % à +15 % dans l’ensemble des scénarios envisagés. Nous continuons donc de surpondérons les actions européennes par rapport aux actions américaines.

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