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Depuis fin février et la rencontre houleuse dans le bureau ovale entre Volodymyr Zelensky, Donald Trump et JD Vance, nous assistons à une séquence de marché qui restera longtemps gravée dans la mémoire des investisseurs. Ce moment charnière correspond à une accélération de l’Histoire et la mise en place d’un nouvel ordre mondial articulé en trois pôles concurrents à la porosité réduite. Les Etats-Unis aux velléités isolationnistes, les pays émergents, au premier rang desquels se trouve la Chine, et enfin l’Europe.
Ce moment de bascule provoque légitimement des craintes, mais il ne faut pas perdre de vue que ce type d’environnement disruptif est aussi synonyme d’opportunités à long terme pour les investisseurs. A cet égard, l’Europe pourrait profiter d’une salutaire prise de conscience collective pour se réformer, dans le but d’atteindre une autonomie énergétique, industrielle et militaire.
Il s’agit probablement là d‘une tendance de fond pour les dix prochaines années que les investisseurs auront tout intérêt d’accompagner, afin de normaliser le lien entre poids économique et poids boursier de chaque pole. Les Etats-Unis pèsent 27% du PIB mondial et 62% de la capitalisation boursière mondiale. A l’inverse, la zone euro c’est 16% du PIB mondial pour seulement 10% de la capitalisation boursière mondiale.
Normalisation des valorisations
A plus brève échéance, nous observons actuellement une normalisation des valorisations des différents segments de marché comme nous l’envisagions dans notre article de début février. En effet, dans un environnement incertain, les investisseurs n’ont d’autre choix que celui de se raccrocher aux valorisations, d’autant plus que l’état des lieux fondamental actuel continue de présenter des inefficiences à même de profiter aux gérants actifs d’actions.
D’un point de vue géographique, on constate que les géographies chères (ratio PER élevé), sont aussi celles qui présentent une surcote par rapport à leurs standards de valorisation historique. C’est le cas des Etats-Unis ou de l’Inde. La forte sous-performance des indices indiens et américains depuis le début de l’année (respectivement -7,3% et -13,5% en euros au 30-04-25), vient donc partiellement corriger ces excès. Un processus qui est encore probablement loin d’être achevé tant la surévaluation des Etats-Unis apparait encore excessive. D’autant plus que la réindustrialisation de l’économie américaine devrait progressivement modifier le mix industriel de l’univers d’investissement américain et faire baisser le niveau des multiples de valorisation du marché local.
Un processus inverse est en cours pour les géographies les moins chères qui sont également celles qui présentent une décote. La forte performance de l’Europe du Sud depuis le début de l’année (MSCI Espagne +20,2%, MSCI Italie +12,2%) s’inscrit dans cette logique. Elle se traduit par une revalorisation de ces géographies qui progressivement se rapprochent de leurs niveaux fondamentaux historiques.
La normalisation des valorisations géographiques observée depuis le début de l’année

La normalisation des valorisations des différents segments qui composent la cote européenne
Le même type de phénomène de normalisation peut également s’observer au sein de la cote européenne. Les secteurs les moins chers, essentiellement les secteurs Value, surperforment et se renchérissent pour se rapprocher de leur «fair value» historique. C’est notamment le cas pour les banques, meilleur secteur européen depuis le début de l’année (Stoxx Europe Banque NR +22,5% au 30-04), les Telecom (+13,8%) ou les Utilities (+16,1%). Un constat qui peut également s’appliquer aux petites et moyennes valeurs qui surperforment puissamment depuis fin février (Stoxx Europe Small NR -1,2% vs Stoxx Europe NR -4,5% du 28-02 au 30-04).
A l’inverse, les secteurs chèrement valorisés, qui sont aussi ceux dont la valorisation actuelle dépasse les standards historiques, ont tendance à sous-performer et se désenchérir. L’emblématique secteur de la Tech en baisse de -4,3% depuis le début de l’année en est la parfaite illustration.

Article de Stéphane Levy,
Stratégiste et Responsable de l’innovation chez Chahine Capital